Comment lever les freins qui nous empêchent d’aller au bout de nos intuitions, de nos désirs de changement, de nos rêves ? D’où vient ce sentiment collant que nous n’y arriverons pas, que nous ne sommes pas à la hauteur, que cela nous échappe ?
La puissance désigne la capacité à agir, à peser sur le réel, à modifier ce qui nous entoure ou ce qui est en nous. L’impuissance nous fait vivre et éprouver l’inverse : sentir, à tort ou à raison, que nous ne pouvons rien faire, rien changer, autour de nous ou en nous. Biologiquement, la sensation d’impuissance est corrélée à un taux de cortisol élevé, c’est l’hormone du stress. Si ce niveau de cortisol reste élevé trop longtemps, il nous rend plus craintifs, plus fragiles, de plus en plus méfiants envers les autres, et surtout moins apte à réfléchir convenablement.
« L’expérience de l’impuissance est forcément douloureuse car elle entrave notre désir d’aider les autres et de rendre le monde plus beau. » Christophe André
Portrait de nos petites impuissances
L’impuissance peut survenir de manière ponctuelle; face à un problème technique sur un ordinateur quand on ne s’y intéresse pas à la base, face aux changements liés à l’adolescence de nos enfants , face à l’étrangeté des comportements d’un collègue, face à une formation déstabilisante, dans le cadre d’échanges avec certains Services Après Vente ou certaines administrations.
Le point commun à toutes ces situations ? Notre représentation du monde est affectée, nos valeurs écornées et notre capacité d’adaptation habituelle touche ses limites. Notre cerveau nous en informe en bloquant notre capacité d’agir.
Vous pouvez maudire les dieux du numérique, les enfants, les autres, les politiques ou tout autre exutoire qui vous plaira, cela allégera peut-être le sentiment de frustration que vous ressentez, mais fondamentalement cela ne changera rien. L’information qui vous libérera est ailleurs.
Poser un autre regard sur l’impuissance
En coaching nous jouons beaucoup sur les changements de point de vue. On peut considérer l’impuissance comme une fatalité car elle nous oblige à stopper le mouvement à un moment donné. C’est aussi une opportunité qui nous est donnée pour intégrer les paramètres et limites de ce que nous vivons ; accepter l’autre, accepter les différentes facettes du monde, accepter la relativité de certaines opinions et même l’idée que l’on a le droit de ne pas réussir. L’immobilité générée par l’impuissance devient ainsi un sas de lâché prise, d’intégration, voire de réévaluation de nos objectifs. C’est un temps pour penser en dehors de la boîte de nos certitudes et pour trouver des solutions.
Concernant l’exemple du numérique, vous avez besoin d’élargir votre champ de connaissances car vous vivez sur vos acquis et ils commencent à dater. Vous pouvez aussi accepter que ce champ de compétence ne vous vous intéresse pas et que vous préférez cultiver votre réseau relationnel pour trouver du soutien sur ce point.
Face à vos enfants, collègues vous devez vous questionner sur vos valeurs, vos comportements, car dans certaines situations ils ne sont plus adaptés, ils peuvent même devenir nocifs pour tout le monde, y compris vous-même.
L’impuissance est une source de développement personnel
Quand l’impuissance survient posez vous ces questions :
- Qu’est-ce qui dans cette situation donnée, génère chez moi un profond sentiment d’impuissance ?
- De quoi ai-je besoin pour vous me sentir mieux ?
- De l’aide de qui ?
- Quelles compétences dois-je développer ?
- À quoi dois-je renoncer ? Pour quels bénéfices ?
L’objectif n’est pas de se perdre dans des cogitations, juste de poser des mots pour mieux comprendre les tenants et aboutissants d’une situation, de se connecter à la réalité de l’instant qui dépasse le champ parfois étroit de nos représentations. En ne niant pas ce que nous percevons, nous sommes libres de nous adapter et d’utiliser pleinement notre intelligence. Intégrer ces informations vous permettra d’utiliser votre créativité pour transcender l’impasse.
L’impuissance apprise ou résignation acquise
L’impuissance à des ressorts très psychologiques et certaines formes d’impuissance sont plus douloureuses car elles reposent sur des scénarios répétitifs. Prenons le cas d’un enfant qui apprend à faire du vélo. Il a très envie d’y arriver pour faire plaisir à ses parents, pour faire comme les grands, pour gagner en liberté, et bien d’autres choses. Derrière le simple fait de vouloir faire du vélo on voit qu’il y a déjà d’autres enjeux.
Il se lance, il vacille, se reprend et finit par tomber un peu plus loin.
Dans le premier cas, les parents de l’enfant viennent l’aider à se relever, n’en font pas un drame et l’encouragent gentiment à recommencer. L’enfant va réessayer, il réussira cette fois ou plus tard, il aura néanmoins appris des choses sur lui, sur la persévérance et sur les dures lois de l’univers qui régissent l’équilibre à vélo. Il a gardé sa capacité d’agir intacte, a renforcé son estime de soi et a même pu développer des nouveaux champs de compétence qu’il pourra transposer dans d’autres contextes. Dans l’enfance, c’est dans la prise de risque que l’on construit sa confiance. Donc éduquer : ce n’est pas protéger, c’est inciter à faire, et être tolérant sur l’erreur.
Dans le second cas, les parents de l’enfant se moquent de lui ou transforment l’évènement en drame. Ils le poussent à remonter soit en se moquant à nouveau, soit en le couvrant de phrases du type « n’oublies pas que tu es fragile », « tu es tellement maladroit, soit prudent », « ton frère au même âge était tellement plus débrouillard que toi ». L’enfant accumule les échecs à vélo avec des stress supplémentaires ; la peur de décevoir, de ne pas être à la hauteur, de ne pas être capable…. Dans ce cas, la difficulté à faire du vélo, couplée aux décharges émotionnelles négatives, va générer le sentiment que cela n’est pas juste, ou pas rationnel. L’enfant, face à cette situation qu’il peine à surmonter et au contexte parental auquel il ne peut pas échapper (car le scénario va se répéter dans d’autres champs d’apprentissage), va brider sa capacité d’agir et va générer par la suite des réponses du type “quoi que je fasse, ça ne sert à rien », « je serai toujours moins bon », apprendre, faire, c’est se soumettre à l’échec, au jugement, et « c’est trop de souffrance pour moi ».
C’est ce qu’on appelle l’impuissance apprise ou résignation acquise. Le concept vient du psychologue américain Martin Seligman. L’impuissance apprise se caractérise d’abord par le sentiment que la situation que l’on vit est permanente. Elle s’exprime dans notre vocabulaire par l’utilisation des mots toujours, jamais, rien, tout, personne… Ce sont des généralisations qui nous donnent la sensation que ce sera « toujours comme ça », que « ça ne reviendra jamais », que « l’on ne peut rien faire », que « tout le monde est comme ça », que « personne ne comprend ».
L’impuissance acquise est alimentée par la répétition de situations qui entretiennent le sentiment échec et nous incitent à percevoir les signaux extérieurs comme les preuves de notre incompétence. Il en résulte une difficulté progressive à évaluer correctement les conséquences de ses actions, une forte baisse de motivation, l’installation d’un sentiment d’apathie, de résignation ou de déprime.
Pour en savoir plus, émission réalisé par Cerveau & Psycho : C’est à travers une prise de conscience des mécanismes et une compréhension de la façon dont l’image de soi s’est construite dans l’enfance que nous pourrons améliorer une confiance en soi défaillante par Frédéric Fanget (lien).
Derrière notre capacité d’agir se cachent nos croyances
Les croyances sont des filtres de lecture, qui conditionnent notre relation monde. Elles ne reposent pas forcément sur des critères objectifs. Notre système de croyances se programme dès notre naissance, afin de répondre et de correspondre aux souhaits de nos parents, de la famille, de l’école, la société et notre environnement de manière générale. Nous adoptons par conséquent les comportements et apprentissages de notre entourage. Métaphoriquement, c’est dans cette période que les fées nous accorde des dons, ou nous jettent des maléfices.
À l’âge adulte, 95% de notre vie se déroule à travers ces programmations subconscientes et seulement 5% à travers notre propre créativité et notre libre arbitre.
En termes plus clairs, nous vivons 95% de notre vie en pilote automatique (notre subconscient) et 5% grâce à nos propres choix (notre conscience). Quand nous sommes convaincus d’une chose, elle devient notre réalité.
De ce fait, la vie que nous vivons est celle pour laquelle nous avons été programmés. Certaines croyances sont ce que l’on appelle des “croyances ressources” et nous les cultivons en coaching ; « j’ai la liberté de… », « j’ai la capacité de… », « mes échecs sont les brouillons de mes réussites », …
D’autres sont appelées “croyances limitantes” et ce sont elles qui sabotent inconsciemment nos actions, car ce sont en fait des blocages psychologiques. C’est les ressorts tragiques de tous les héros de la mythologie, qui ont été programmés à vivre certains scénarios dramatiques. En toile de fond nous retrouvons la litanie des « je ne mérite pas l’amour, l’argent, la reconnaissance », « je dois être parfait, fort, faire des efforts, faire plaisir, faire vite » et ce, jusqu’à nier mes émotions et mes besoins.
Lorsque nous constatons que nous devons fournir beaucoup d’efforts pour parvenir à certains résultats, quel que soit le domaine de notre vie, c’est que nous sommes en train de lutter avec les conditionnements de nos croyances.