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Voici quelques outils pour vous aider à mieux cerner les différents profils, potentiellement problématiques dans un groupe et les moyens de les canaliser de manière positive.

Cet article est issu d’un atelier que j’ai mis en place à destination des formateurs de la Coopérative d’activité Talents Croisés. Pour ne pas aborder le sujet de manière binaire, j’ai proposé une mise en bouche intégrant les notions de base de la Communication Non Violente (et plus particulièrement l’art de la reformulation) et l’Analyse Transactionnelle. Il n’y a pas les gentils d’un côté et les méchants de l’autre. Il y a des rôles inconscient qu’il s’agit de mettre en lumière pour les amener à jouer un rôle plus conscient et utile au groupe.

Le tout (groupe) est plus que la somme des parties (individus)

Le groupe est bien plus que la somme des participants, c’est le fruit de relations, d’échanges, de passifs, … Soit un formateur + des individus + un groupe.

Il est important de l’envisager comme un écosystème ou chacun à une place à prendre et à tenir. La qualité des échanges au sein du groupe va garantir sa dynamique, son implication ou sa résistance. Moyenne en quoi un groupe n’est pas homogène, stable et passif.

Naissance du groupe

Que les participants se connaissent ou non, il est important de prendre un temps pour créer le groupe, avant il n’existe pas ! Ce temps permettra aux participants de :

  • Se connaître : Qui est là, pourquoi ? Lorsque les personnes se connaissent déjà, c’est l’opportunité de se découvrir sous un autre angle.
  • Se situer mutuellement : Est-on dans la même situation ? Quelles sont les attentes ? Les liens hiérarchiques ?
  • Tisser les échanges : Ménager des temps libres entre les participants pour renforcer la cohésion.

Tant que le groupe n’est pas « né », il manque des ingrédients pour générer de la confiance, de la coopération et il est difficile de prendre des décisions collectives, les choix seront individuels.

Le groupe a besoin de maturité pour agir de manière authentique, coopérative et bienveillante.

Les différents rôles dans un groupe

Il y a des rôles officiels dans un groupe structuré issu d’une entreprise, une association, … Ce sont des rôles attribués.

Il existe pourtant une autre répartition des tâches, de l’influence, du pouvoir : ce sont les rôles officieux. Il y a celui qui conteste, celui qui se plaint, celui qui veut se charger des tâches pénibles, le boute-en-train, … Ces rôles sont spontanés et reliés à une personnalité. La vie du groupe va être marquée par leurs interventions.

Les rôles qui vont être décrit sont symboliques et revêtent des formes et des réalités complexes. Dans leur dimension négative il est bon de se rappeler que ces personnes ne font pas exprès d’agir comme elles le font. Elles se voient la plupart du temps dans l’expression de leur bon droit et pensent avoir une action bénéfique pour le groupe. Les voici en partant du rôle le plus facile à observer au plus complexe.

 Le bouc émissaire

C’est celui qui apparaît le premier dans un groupe. De manière manifeste, le bouc-émissaire se donne le droit d’énoncer à haute voix ce que les autres peuvent penser dans l’intimité. Il est « envoyé » par le groupe pour effectuer cette tâche. En général il n’y a pas eu concertation avant, c’est la logique interne au groupe qui amène à ce type de comportement.

Bien qu’il se sente désigné par le groupe, ou à cause de cela, le bouc émissaire est un marginal qui a un pied dans le groupe et un pied à l’extérieur. Il prend le risque d’être rejeté par le groupe et d’être mal reçu par le formateur. Il agit sur le fil du rasoir en cherchant la confrontation et ne mesure pas nécessairement les conséquences de ses interventions.

Le bouc émissaire test les capacités émotionnelles du formateur, essentiellement son sang-froid et son sens de la maîtrise. Il cherche à le déstabiliser en le provoquant de manière plus ou moins ouverte. Son rôle consiste à le faire monter en symétrie pour que l’interaction puisse être aussi importante et aussi longue que possible. C’est en acceptant, trop facilement et trop fréquemment de justifier ses positions que le formateur perd la « bataille ». Lorsqu’il est obnubilé par le bouc émissaire, aux yeux du groupe il est de moins en moins formateur et de plus en plus polémiste.

Il y a deux tendances de bouc émissaire les deux étant des profils qui conçoivent la base de la relation dans la confrontation ou la revendication :

Le bouc émissaire borderline a des fragilités sur le plan relationnel. Il pense prendre sa place dans le groupe en se chargeant de ce que le groupe porte de plus négatif. C’est une sorte de « militant » hors-cadre. Il est complètement dans le jeu du Triangle dramatique de Karpman!

Le bouc émissaire « militant » a des qualités naturelles qui lui permettent de faire remonter les choses car le contexte de la formation ou de l’animation influence le cadre (tension dans une entreprise, non-dits, …). Il peut avoir une action positive en mettant en lumière les problèmes sous-jacents.

Le bouc émissaire, par son comportement de service qu’il rend au groupe se place sur la liste des prétendants pour devenir leader ! Il peut être confondu avec le leader lui-même.

Que faire avec un bouc émissaire ?

C’est le profil le plus difficile à circonvenir car c’est celui qui utilise les techniques d’échange les plus « grossières ». Il peut être impressionnant, déstabilisant, … Le formateur doit donc contenir sa peur et ne pas monter en symétrie avec le comportement du bouc émissaire qui cherche à le conduire sur le terrain de la justification, et même celui de la justification de la justification.

La recherche du consensus va tout bloquer. Vous êtes responsable du cadre tenez le, réaffirmez-le.

La solution la plus risquée, si vous en sentez les capacités, est de déborder la stratégie du bouc émissaire. Il ne s’agit pas de répondre frontalement aux provocations, mais d’être encore plus provoquant que le provocateur officiel. C’est en utilisant les mêmes outils de communication que vous pouvez le « contrôler ». C’est une action ponctuelle, qui ne doit pas durer.

Vous pouvez aussi donner un rôle plus productif au bouc émissaire, la notion de jeu n’est jamais très loin avec ce type de profils, soyez créatif.

Le bouc émissaire ne doit pas être trop violemment rejeté car il est capable de s’allier au reste du groupe contre vous. Nous sommes dans une triangulation bouc émissaire / animateur / peuple, où celui qui sait subtilement trouver ses alliés, en dehors de toute agressivité et forfanterie, va emporter la lutte interactionnelle.

Le séducteur

Cette personne test l’amour-propre du formateur. Elle le flatte, ce qui revient à évaluer ses capacités de remise en question. Elle a un puissant pouvoir anesthésiant en laissant croire à celui-ci qu’il est au sommet de ses capacités et qu’il n’a plus rien à prouver.

La fonction du séducteur est d’endormir le formateur et de le rendre ainsi complètement inoffensif. Il obtient la même chose que le bouc émissaire, à savoir la « neutralisation » du formateur au profit du groupe, avec une stratégie radicalement opposée.

Tout comme le bouc émissaire, le séducteur peut se sentir « envoyé » par le groupe, bien que son jeu soit plus personnel et qu’il prenne moins de risques. C’est un profil qui aime la fusion et jouer sur le plan affectif.

Que faire avec un séducteur ?

Si l’animateur / formateur se montre avide des flatteries du séducteur, certaines personnes du groupe vont se sentir délaissées, voir trahies, même si le séducteur œuvre pour le groupe. Comme pour le bouc émissaire, il va falloir faire preuve de doigté pour installer une distance, pour ne pas adhérer trop rapidement aux avances du séducteur.

Attention, les profils affectifs passent vite de l’amour à la haine.

L’anticonflictuant

C’est un rôle moins apparent. Il est au centre du groupe, à la confluence de toutes les interactions. Il a besoin de contrôler l’ensemble du groupe pour jouer son rôle, c’est-à dire empêcher toute velléité de conflit et de désaccord. Il se donne pour tâche d’éloigner les possibilités de confrontation notamment entre le groupe et le formateur. Au mieux il apaise, détend et calme, au pire il risque par son action de retirer toute saveur, tout dynamisme aux interventions.

Il est dans le contrôle et il empêche le groupe d’exprimer ses émotions (donc de les gérer) puisqu’il se donne la charge d’éviter qu’elles se manifestent.

En se proclamant régulateur il empiète sur le rôle du formateur. Il montre ses prétentions de conduite du groupe sur un plan essentiellement émotionnel.

Que faire avec l’anticonflictuant ?

S’il a une action discrète, il peut avoir un rôle de « Peace maker » dans le groupe. Si son action est plus marquée, il peut y avoir confrontation immédiate. Comme l’anticonflictuant n’aime la confrontation par principe, lors d’une mise au point il s’effacera rapidement.

Le leader 

C’est celui qui va prendre la tête du groupe et pourtant c’est celui qui peut être le plus caché. Il n’exerce pas toujours son pouvoir de manière apparente et il se niche dans l’intimité de l’ensemble pour conduire un certain nombre d’interactions. On dit parfois de lui qu’il « conduit par l’arrière » car il se place en biais ou dans les derniers rangs pour observer l’ensemble du groupe dans ses interactions avec l’animateur.

Son influence ce manifeste essentiellement de manière non verbale, il faut surprendre les regards qui se tournent vers lui pour obtenir un signe d’approbation (c’est plus valable en animation de réunion).

Le véritable leader d’un groupe ne cherche pas le spectaculaire ou le manifeste. C’est parce qu’il reste effacé et caché qu’il affirme son pouvoir.

Ces choix ou ses avis deviendront ceux de la majorité du groupe. Son influence repose sur :

  • Une fonction d’autorité (leader institutionnel)
  • Une aura naturelle (facilité de communication, leader charismatique)
  • La maîtrise du sujet traité (leader expert)

Que faire avec un leader ?

Le leader peut être un concurrent ou un allier puisque le leader va occuper une partie de la place attribuée officiellement au formateur. Il s’agit donc de le mettre « dans sa poche », car il est une sorte d’alter égo. Il faut l’identifier sans le dévoiler, trouver l’occasion de le qualifier dans le cours des interventions, tout en ne mettant pas en évidence son rôle. Il peut être utile de lui assigner une fonction dans le groupe, sans pour autant donner le sentiment au groupe d’un assujettissement à son pouvoir.

Si le leader est positif, il poussera le groupe à coopérer dans le sens du formateur. Ce dernier pourra s’appuyer sur lui, tout en maintenant une égalité de considération entre les participants.

Si le leader est négatif, il se positionnera en contre, les idées exprimées, le programme, le formateur, … Il aimera se placer dans des jeux de pouvoir, notamment en instrumentalisant le bouc émissaire et le séducteur.

Le peuple ou le chœur

Reste tous les autres participants, qui ne prendront pas immédiatement le parti de l’un ou de l’autre des rôles nommés précédemment. Ce qui les intéressent c’est l’adéquation – ou la non- adéquation – entre les objectifs de la formation et ce qui s’y déroule effectivement. Nous sommes dans un subtil rapport de force entre changement et non-changement. Apprendre, changer, demande un effort, de l’implication … et le peuple est versatile. Soyez attentif au niveau de fatigue, d’attention.

Quand le formateur se montre capable de gérer les différentes personnalités du groupe, il se met en position d’y apporter le changement. S’il se fait déborder par le jeu interactionnel, c’est le non-changement qui va s’imposer.

Pour le formateur, l’enjeu principal de son action se situe d’abord dans la prise en compte du cadre, c’est-à-dire au niveau des compétences relationnelles, avant qu’il puisse prétendre apporter quoi que ce soit en matière de contenu, de savoir-faire ou d’expérience.

Vous avez envie de voir le monde autrement ?